La plupart des Américains croient, mais pas toujours au Dieu de la Bible

La plupart des Américains croient, mais pas toujours au Dieu de la Bible

Même s’ils se disent non croyants, de nombreux Américains croient en une puissance supérieure. Est-ce par pression sociale ou parce que l’on ne saurait répondre aux questions de foi par un simple oui ou non?

Photo: La création d’Adam de Michel-Ange LDD

, RNS/Protestinter

Une nouvelle enquête de Pew Research constate qu’un tiers des Américains, qu’ils disent croire en Dieu ou non, mettent leur foi en une puissance ou force spirituelle supérieure. Les personnes appartenant à ce groupe interprètent de manière plus fluide ce qui est transcendant. Certains le nomment Dieu, d’autres pas.

Pour cette étude, 4729 personnes ont répondu à un formulaire en ligne en décembre passé. Comme d’autres recherches de ces dix dernières années, l’on constate que le nombre d’Américains qui croient en Dieu diminue petit à petit et que la diversité des croyances augmente aux États-Unis.

«Une des questions autour de laquelle était centrée l’étude, était d’avoir plus d’informations sur ceux qui disent ne pas croire en Dieu», précise Gregory Smith, directeur associé pour la recherche à Pew. «Nous voulions savoir ce que rejettent ceux qui disent “non” de façon directe quand on leur demande “est-ce que vous croyez en Dieu?” Sont-ils en train de rejeter le fait de croire en Dieu ou carrément le concept de puissance supérieure?» Dans l’enquête, ceux qui ont déclaré ne pas croire en Dieu ont été interrogés pour savoir s’ils croyaient par contre en «une autre puissance supérieure ou force spirituelle dans l’univers.»

Il en ressort qu’une petite majorité de 56% affirme croire au Dieu de la Bible dans son acceptation traditionnelle: plein d’amour, de sagesse et tout puissant. Ensuite, on retrouve les incroyants purs et durs: environ 10% de la population qui disent ne croire ni au Dieu de la Bible ni en une puissance supérieure. Mais parmi les soi-disant «sans religion», on constate que 72% d’entre eux croient en une quelconque puissance supérieure.

Deux enquêtes de Pew précédentes ont montré que la croyance en Dieu diminue de manière générale. Une étude de Pew a montré que 92% des Américains croyaient en Dieu en 2007; en 2014, ils étaient 89%. Et enfin ce chiffre est passé à 80% lors du sondage le plus récent, mais la méthode était différente: c’était un sondage en ligne plutôt que par téléphone.

La croyance en Dieu tel que décrit dans la Bible est la plus grande chez les personnes qui se reconnaissent comme chrétiennes — 80% d’après l’enquête. Ce chiffre atteint même 91% et 92% respectivement chez les évangéliques et les protestants noirs. Cette valeur baisse à 72% pour les protestants en général et à 69% pour les catholiques. Seul un tiers des juifs, par contre, croit au Dieu de la Bible. (L’enquête n’a pas eu suffisamment de réponses de la part de musulmans ou d’autres croyants pour en tirer des chiffres.)

L’enquête montre aussi que:

  • La croyance au Dieu de la Bible diminue avec l’âge;
  • Les moins de 50 ans voient Dieu comme moins puissant et moins impliqué dans les choses terrestres que les Américains plus âgés;
  • Chez les étudiants, seuls 45% croient au Dieu de la Bible.

Les opinions sur Dieu diffèrent généralement suivant les partis politiques et la race. Ainsi, 70% des républicains croient au Dieu de la Bible, contre 45% des démocrates. Parmi les démocrates, on voit toutefois de grandes différences dans la vision de Dieu suivant la race: 70% des démocrates non blancs croient au Dieu de la Bible — soit un nombre similaire aux valeurs observées chez les républicains.

On retrouve une croyance en une puissance supérieure dans chaque segment de la population sans appartenance religieuse. En tout, 70% des «sans religion» admettent croire en une force spirituelle. Chez les personnes se déclarant agnostiques, c’est 62% et même chez les athées, près d’une personne sur cinq (18%) affirme croire en une puissance supérieure.

Éviter les préjugés qui touchent les athées

Ryan Cragun, sociologue à l’Université de Tampa et spécialiste des mouvements non religieux, estime que si tant de personnes qui se disent sans religion déclarent tout de même croire en une puissance supérieure, c’est pour s’éviter les préjugés sociaux, voire la discrimination que vivent les athées. «À quel point disent-ils cela pour éviter les préjudices est une question intéressante», s’interroge Ryan Cragun. Il rappelle que selon certaines études les hommes blancs hétérosexuels diront probablement qu’ils se considèrent comme athées, car en raison de leur situation sociale privilégiée, ils se sentent moins exposés avec une telle déclaration.

D’autres chercheurs estiment que la catégorisation des convictions religieuses avec ses options binaires — oui ou non — ne permet pas de prendre en compte toute la diversité des expériences humaines. «La transcendance par exemple, peut être une expérience surnaturelle, mais aussi naturelle», explique Elisabeth Drescher, professeure en études des religions à l’Université de Santa Clara et auteure de «Choisir sa religion: la vie spirituelle des “sans religion” en Amérique.» Elle ajoute: «Certains croient en la puissance qui anime la vie ou dans l’esprit humain.»

«Beaucoup de personnes font des expériences qui semblent mystérieuses ou inexplicables ou impressionnantes, et s’identifient logiquement comme non-religieuses ou non-croyantes, mais gardent néanmoins le sentiment que nous ne savons pas tout», développe Elisabeth Drescher. «La réalité des expériences des gens est tellement plus complexe et nuancée.»

La marge d’erreur dans l’échantillon pour l’ensemble des 4'729 participants était de plus ou moins 2,3%.