Une révolution virtuelle en marche

Une révolution virtuelle en marche

Protestinfo propose régulièrement des éditos rédigés par des membres des rédactions de Médias-pro.

Joël Burri, rédacteur responsable de Protestinfo, partage ses impressions au retour d’un colloque sur la réalité virtuelle.

Photo: Un smartphone dans un cartonnage, la solution la plus accessible pour s’immerger dans un monde virtuel CC(by)Detlef La Grand

Un casque composé d’un écran et d’un détecteur de mouvement: un smartphone glissé dans un astucieux cartonnage fait l’affaire. Il n’en faut pas plus pour découvrir la réalité virtuelle VR, prononcez Vihârr pour faire branché. Chaque œil perçoit une image différente, ce qui permet de reconstituer le relief, et l’image est calculée en temps réel afin de suivre tous les mouvements de tête. Le petit sentiment nauséeux, ressenti lors des premières secondes d’essai s’estompe très vite pour laisser place à l’émerveillement.

Car oui, enfiler un dispositif de réalité virtuelle provoque encore ce petit effet Wouaw! Vous vous souvenez, le même qu’avait l’iPad a ses débuts: il suffisait de sortir l’appareil dans la rue, pour que tout le monde veuille voir et toucher la révélation. Et peu importe le contenu, c’était l’expérience du nouveau média qui attirait les foules. Les spécialistes en marketing en avaient bien profité à l’époque! Et puis la tablette est devenue banale, et le public est devenu plus exigeant sur le contenu.

Alors que la VR se démocratise —caméras et dispositifs de visualisation sont désormais disponibles pour quelques centaines de francs — je n’imagine pas une seconde que ce ne soit là qu’un effet de mode! Nous sommes bien en train d’assister aux premiers pas d’un nouveau média.

Et ce nouveau média était au cœur des réflexions de la session annuelle de la Conférence européenne de l’internet chrétien (ECIC). J’en reviens avec des questions aussi vertigineuses que l’impression ressentie la première fois que l’on chausse un casque de réalité virtuelle!

Dans sa conférence Piotr Baczynski, fondateur d’Immersion, une entreprise qui produit des contenus VR, a donné deux exemples d’usage de ce nouveau mode de communication. Des rencontres virtuelles avec des réfugiés syriens ont permis de convaincre les délégués de l’ONU d’augmenter le nombre de réfugiés accueillis par les nations membres. Par ailleurs, la télévision «Russia Today», qui diffuse dans diverses langues l’actualité telle qu’elle est perçue par le pouvoir russe, propose déjà un flux d’informations en VR. «Ils veulent faire passer leur message, et pour le moment, vu le manque de contenu, c’est eux que l’on va voir quand on est équipé», souligne le conférencier.

Le Pr. Wojciech Cellary se demande quant à lui, quel impact ce nouvel outil aura sur notre société, puisqu’il deviendra de plus en plus difficile de différencier réalité et média. Le chercheur en informatique se demande par exemple quelle position éthique prendre sur le meurtre virtuel dans un jeu, quand celui-ci atteint un tel niveau de réalisme. Et ce d’autant plus que l’on imagine déjà de nombreuses personnes qui dans le futur ne sortiront plus de la réalité virtuelle: pour des raisons médicales ou pénitentiaires, par exemple, la réalité virtuelle deviendra leur réalité.

Bref, nous sommes au début d’une révolution qui va sans doute bouleverser la communication, les loisirs, bref la société. Allons nous regarder cela avec dédain et laisser les fabricants de solutions techniques définir seuls les normes d’usage? Ou au contraire serons-nous parmi les premiers utilisateurs; les premiers acteurs?

Une présentation du projet de réalité virtuelle de l'ONU