«La tolérance n’est pas l’indifférence»

«La tolérance n’est pas l’indifférence»

L’évêque émérite Wolfgang Huber met en garde contre une fausse idée de la tolérance. Il invite les croyants à se montrer critiques envers toute religion, y compris la leur.

Photo: Une statue d’Edo van Tetterode dédiée à la tolérance à Hilversum aux Pays-Bas. LDD, Wikifrits

Hanovre (EPD/Protestinter). «La tolérance n’est pas l’indifférence», a déclaré Wolfgang Huber, ancien président du Conseil de l’Eglise protestante d’Allemagne (EKD), la semaine passée à Hanovre. «Une personne tolérante ouvre également le débat sur ce qu’elle ne peut accepter.» C’est-à-dire, par exemple, sur la légitimation de la violence ou de l’antisémitisme au nom de la religion. Wolfgang Huber s’est exprimé dans le cadre d’une table ronde du forum Hanns Lilje, sur le thème «La pluralité religieuse en tant que défi». Cette position est défendue par divers théologiens tant chrétiens que musulmans qui mettent en garde contre une fausse idée de la tolérance religieuse.

Cette question ne touche pas que l’islam, a expliqué Wolfgang Huber. «Je ne peux pas non plus voyager le cœur léger dans un pays où l’Eglise luthérienne refuse l’ordination des femmes ou en a rétabli l’interdiction.» Le théologien met en garde contre la tendance à assimiler islam et islamisme. Les motivations des terroristes ne sont pas que religieuses, mais aussi, et surtout politiques. Il existe cependant bel et bien des musulmans qui justifient la terreur au nom de la religion. Face à cela, ce sont avant tout des processus de clarification internes à l’islam qui s’imposent, affirme l’ancien évêque. Cette religion doit devenir «plus capable de pluralisme» — non pas par seule stratégie, mais aussi par conviction.

L’évêque émérite le souligne: l’Allemagne n’est pas un pays laïque, mais une terre de diversité religieuse. Les croyants y sont majoritaires, formant environ les deux tiers de la population, mais leurs religions sont plus variées qu’autrefois. Devant cette pluralité, Mgr Huber invite les Eglises chrétiennes à mettre de nouveau en avant l’Evangile en tant que cœur de leur foi. Les communautés religieuses doivent avoir conscience des valeurs qu’elles défendent: ce n’est qu’alors qu’elles peuvent se confronter dans des débats critiques.

Dans le cadre d’un dialogue interreligieux, tous les participants doivent discuter d’égal à égal, mais non sans esprit critique, ajoute la théologienne musulmane Hamideh Mohagheghi. Il est utile de savoir remettre en cause sa propre foi. «C’est stimulant de se pousser à évoluer.» Mais les points critiques doivent être abordés dans un but constructif et non pour affirmer une supériorité, souligne-t-elle. «Sinon, on ne fait que mettre les autres sur la défensive.»

Les musulmans doivent avant tout se demander pourquoi nombre de leurs jeunes se radicalisent. La séparation entre sunnites et chiites n’était pas non plus aussi marquée autrefois, affirme-t-elle. «On pouvait prier ensemble et se marier entre communautés.» De nombreux musulmans considèrent l’islam comme la seule vraie religion, mais d’autres travaillent pour faire avancer l’acceptation de la diversité religieuse. La théologienne d’origine iranienne met cependant en garde contre la tendance qui consisterait à séparer les musulmans en deux blocs: celui des libéraux, considérés comme les «bons», contre les traditionalistes vus comme les «méchants».